Le colloque du réseau Ingenium, avec Epsi et l’OFC du 12 décembre 2024, Paris
Ingénieries & Anthropocène ? Nouveaux enjeux, nouveaux parcours en sciences humaines et sociale
Engineering & Anthropocene? New Challenges, New Paths in the Humanities and Social Sciences
International Colloquium
Thursday, December 12, 2024, from 9 AM to 6 PM CNAM, Paris
Réseau Ingenium, in collaboration with EPSI and OFC
CALL for paper english version ==> ICI
Colloque International
Jeudi 12 décembre 2024, de 9h à 18h
CNAM, Paris Réseau Ingenium, en collaboration avec EPSI et l’OFC.
- L’argumentaire du colloque
- Des référentiels de compétence
- Les axes du colloque
- Les modalités et échéances de l’appel à communication
- La composition du Comité Scientifique
Comment les ingénieurs et ingénieures du 21e siècle se positionnent face aux enjeux/questions amenées par l’entrée dans l’Anthropocène, et comment les sciences humaines et sociales contribuent-elles à ce positionnement, notamment dans les formations ? C’est le sujet que le Réseau Ingenium a voulu saisir à bras le corps dans la continuité du colloque international qu’il avait organisé sur l’intégration des enjeux du développement durable dans les formations (2021) et du séminaire qu’il avait réalisé sur les tabous au sein des formations en ingénierie (2022).
En effet, le colloque de 2021 avait montré que les sciences humaines et sociales revêtent un rôle spécifique, notamment pour penser les techniques et les limites de la biosphère. L’historien José Halloy avait ainsi proposé la notion de “technologie zombie” pour désigner des systèmes techniques condamnés à disparaître du fait de contraintes physiques, ou du fait de la nécessité de survivre avec le changement climatique. Pour aller vers des technologies moins mortifères, tout le cycle de vie des produits doit être repensé, de sa phase de conception à celle de sa réparation-maintenance jusqu’à celle de la recyclabilité, comme les ateliers du colloque avaient permis de commencer à explorer. Il en ressortait que les ingénieur-es ont un rôle clé à jouer dans ces vastes espaces d’activités où esprit critique et réflexivité, possibilité d’analyse systémique ou en complexité, apport de l’éthique notamment, semblent indispensables. En outre, la tension entre l’ingénieur-e exécutant et l’ingénieur-e ingénieux-se avait été mise en lumière. Car ce qui est réalisable n’est peut-être pas souhaitable, et ce, pour des raisons qui sont totalement étrangères à la logique économique ou à l’état de la technologie proprement dite. Enfin, la complexité de la technologie requiert aujourd’hui, encore plus qu’hier, que les ingénieurs comprennent, (voire collaborent avec) des personnes dont la formation et l’expérience diffèrent considérablement des leurs (avec l’idée de “responsabilité distribuée”, d’inscription dans des réseaux d’acteurs et de dispositifs matériels, etc.). Au final, ce colloque avait permis de montrer que de nouvelles compétences apparaissent plus que jamais nécessaires aux ingénieurs, afin de développer une compréhension plus réflexive de leur activité, en tant que pratique située et dépendante.
Le séminaire sur les tabous fin 2022 avait quant à lui souligné la difficulté pour les ingénieurs de modifier leurs comportements et leurs représentations des enjeux (violences sexuelles et sexistes, questions de genre, orientations par défaut des futurs ingénieurs…). Le séminaire avait noté l’absence d’échanges langagiers entre élèves-ingénieur-es sur ces sujets, l’absence de prise de parole spontanée. La question de l’éthique avait ainsi trouvé sa place pendant le séminaire : comment interroger ces tabous, puis les dépasser ? Or, ces questions de comportements sont aussi en jeu à l’ère de l’Anthropocène, d’où le lien inattendu entre le colloque de 2021 et le séminaire de 2022, et sur lequel nous souhaitons prolonger la réflexion.
Aujourd’hui, les crises écologiques et sociales en cours appellent toujours des mutations profondes et systémiques de nos sociétés. Dans cette perspective, comment ne pas envisager que les formations d’ingénieurs forment des citoyen·nes éclairé·es, les préparent aux différentes transitions à mettre en œuvre, avec des enseignant·es qui décloisonneraient les savoirs entre communautés disciplinaires historiquement distinctes, créeraient de nouvelles ressources (disciplinaires et transdisciplinaires), partageraient les savoirs et les pratiques pédagogiques ?
Pour réfléchir à cela, nous avons décidé de parler des ingénieries3 au pluriel car les positionnements des informaticiens ou des ingénieurs en génie civil, ou encore des biochimistes, ou agronomes ne sauraient être confondus. Même si des principes communs sont observables, comme la nécessité de données tangibles ou de réflexivité, les analyses portées sur l’Anthropocène et les réponses apportées diffèrent. La question du technosolutionnisme par exemple est saisie de manière distincte suivant les spécialités, et parfois au sein même des spécialités.
L’Anthropocène – notion géologique, encore en discussion, qui, dans une acception élargie, entremêle les dimensions scientifique et militante – questionne l’impact des activités humaines à l’échelle de la biosphère. Cette trace est souvent signe de conséquences non désirées : perte de biodiversité, changement climatique, acidification des océans, disparition des zones non habitées, etc., en lien avec un modèle économique spécifique. Comment réagit le monde des ingénieries face à cela ? Dans quelle mesure les ingénieur- es se sentent-ils/elles concerné-es ? Comment perçoivent-ils/elles cela ? Comment posent- ils/elles le problème, si problème il y a selon leurs analyses ? Quelles réponses et quels arguments proposent-ils/elles ? Quelles philosophies, quels paradigmes ? Quelles préférences ? Quels moyens, notamment quelle marge de manœuvre ? Et dans quelle mesure leur action sera plutôt individuelle ou collective ?
Des référentiels de compétence
Face à ces questions, reprises vivement par des élèves-ingénieur-es lors de la remise de leurs diplômes ces dernières années, un certain nombre d’acteurs proposent des référentiels de compétences qui sont disponibles aujourd’hui, au niveau national ou européen :
- MESR (2010). Référentiel DD&RS de l’enseignement supérieur
- Jouzel, J. et Abbadie L. (2020). Enseigner la transition écologique dans le supérieur, Recommandations formulées par le groupe de travail pour la mise en œuvre opérationnelle de la mission “Enseigner la transition écologique dans le supérieur”
- MESR (2022). Plan climat-biodiversité et transition écologique de l’Enseignement supérieur et de la Recherche
- MESR (2023). Cadrage et préconisations du ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche
- Cour des comptes (2023). L’enseignement supérieur face au défi de la transition écologique
- CTI (2023). Références et Orientations (R&O). Depuis mars 2022, les enjeux environnementaux y sont intégrés de manière plus détaillée qu’auparavant et déclinés dans les différentes activités des écoles : fonctionnement, campus, recherche, vie étudiante, international, etc.
- GreenComp. (2023) Le référentiel européen de compétences en matière de développement durable
Si ces référentiels contribuent à faciliter l’intégration des enjeux socio-écologiques ou de l’Anthropocène dans les formations, au moins en les rendant visibles, ils sont loin d’en épuiser le sujet, et suscitent même parfois de nombreuses interrogations.
Au final, le colloque international “Ingénieries & Anthropocène ?” accueillera des communications qui pourront revêtir différents aspects : une recherche (résultats, en cours, projets…), une expérience, un témoignage d’entreprise ou d’association, une pratique pédagogique originale, une réflexion personnelle. Les propositions pourront définir, de manière critique, ce que les auteur-rices entendent par “anthropocène”, ou par “éducation aux enjeux de l’anthropocène”, ou par “écologie”. Elles pourront témoigner explicitement d’expériences pédagogiques ou de recherches portant sur un projet de formation des ingénieur-es aux enjeux de l’anthropocène.
Les propositions attendues viseront à alimenter les débats qui seront organisés autour de différents axes, par exemple et de manière non exhaustive :
- Comment enseigner à l’heure de l’Anthropocène ?
- De quelles compétences parlons-nous ?
- Ethique et l’Anthropocène : des liens indéfectibles ?
- Anthropocène : quels liens ou quelles oppositions entre recherche et engagement ?
Ces axes sont davantage développés ci-après.
L’articulation entre ingénierie et anthropocène fait écho à plusieurs thèmes, articulés autour de différentes grandes questions, dont notamment celles qui figurent ci-dessous :
1. Comment enseigner à l’heure de l’Anthropocène ?
- Quels contenus proposer dans les formations en ingénierie, activités confrontées à des injonctions contradictoires entre croissance/ amélioration continue et sobriété, high-tech et low-tech etc. ?
- Quels effets peuvent avoir ces injonctions contradictoires sur les parcours et la santé des étudiants comme des enseignants (bifurcation, ruptures, eco-anxiété, etc.) ? Importance des capacités de décryptage pour développer les capacités d’action ?
- Comment impliquer les points de vue étudiants dans la construction de leur formation (RESES et CNE – Consultation Nationale Etudiante) ?
- Quelle place pour la co-construction et la collectivisation des enjeux contre une éthique individuelle dépendante des structures économiques ?
- En tant qu’enseignant, comment faire face au mal-être que la confrontation à la crise environnementale peut induire chez les étudiants ?
- Quelles équipes pédagogiques pour accompagner ces nouveaux contenus ?
- Quelle place pour l’interdisciplinarité, notamment avec les sciences de l’ingénieur ?
- Peut-on parler d’activités éco-pédagogiques ? d’éco-ingénierie ?
- Qu’en est-il de la formation scientifique et technique des enseignants en sciences humaines et sociales ?
- Comment tirer parti des figures historiques d’ingénieurs ayant contribué aux actions ou à l’histoire des idées écologistes ?
- Quelle intégration de l’anthropocène dans les pratiques/activités pédagogiques existantes ? (pédagogie par problème, pédagogie par projet)
2. De quelles compétences parlons-nous ?
- Quelles compétences sont à acquérir par les futurs ingénieur.es face à l’anthropocène ?
- Quelles compétences sont mobilisables ou mobilisées par les enseignants durant des activités pédagogiques liées à l’Anthropocène ?
- Comment valoriser et reconnaître les compétences formelles et les compétences informelles acquises durant (et hors) des activités pédagogiques liées à l’Anthropocène ?
- Comment intégrer la question de l’évaluation face à des compétences parfois informelles, évolutives ou/et face à des référentiels émanant d’acteurs engagés ?
- Quels sont les objectifs d’apprentissage visés ?
- Quelles sont les démarches didactiques et pédagogiques mobilisées ?
- Quelle reconnaissance du monde professionnel concernant ces compétences intégrant
- l’”Anthropocène” ?
- Comment coordonner les compétences individuelles aux acteurs organisationnels et aux enjeux socio-écologiques ?
3. Ethique et l’Anthropocène : des liens indéfectibles ?
- En quoi la culture d’ingénierie peut-elle accélérer ou freiner la prise en compte des enjeux écologiques et sociaux ?
- Comment accorder l’éthique individuelle des ingénieurs aux enjeux collectifs socio- environnementaux?
- Quelle place pour une politisation de l’innovation en démocratie ?
- Quelles transformations, ou ruptures, génèrent la notion d’Anthropocène dans les métiers d’ingénierie ?
- Quels nouveaux liens sont à construire entre la conception des systèmes techniques, les futurs souhaitables et les enjeux sociaux et environnementaux ?
- Comment les normes déontologiques pensées par et pour des ingénieurs prennent-elles en considération les enjeux de l’Anthropocène aujourd’hui ?
- Quelles ressources permettraient à ces normes d’inclure davantage ces questions : la pensée écoféministe, l’éthique du « care » par exemple ?
- Dans quelle mesure les compétences éthiques attendues des ingénieurs incluent-elle le souci de l’écologie
- Comment sont mobilisés les savoirs (recherche, militants) par les ingénieurs face à l’Anthropocène ?
- Quels effets de l’Anthropocène sur l’organisation des savoirs scientifiques, sur les terrains de recherche, les militants, les partenaires ?
- Quels usages de “l’expertise” dans l’engagement des ingénieurs ?
- Quel(s) types d’engagement(s) mettre en œuvre par les ingénieurs face à l’Anthropocène ?
- Quels dispositifs sont mis en place par les établissements de formation en ingénierie pour questionner les liens entre recherche et engagement militant, éventuellement avec la vie étudiante ?
Les modalités et échéances de l’appel à communication
Votre proposition de communication présentera un résumé de 200 mots maximum à faire parvenir sous formats Word et PDF (police Times New Roman, taille 12, interligne 1,5), hors le titre, le(s) auteur(s), le(s) institution(s), cinq mots clés maximum, et éventuellement trois à cinq références bibliographiques maximum, au plus tard pour le 1er juin 2024 (délai de rigueur) à secretariat@reseau-ingenium.fr
Les propositions peuvent émaner d’enseignants chercheurs, de professionnels de l’éducation, de professionnels ingénieurs, d’étudiants, ou toute personne intéressée par cette thématique.
Plusieurs formats et supports de communications orales sont possibles : posters (5 mn), retour d’expérience (10 mn), communication de recherche (avec diaporama – 15 mn). Nous vous remercions de nous indiquer votre souhait de format. Le comité scientifique se garde le droit de statuer sur le format retenu.
Les résumés seront soumis à une expertise en double aveugle.
Notification acceptation / refus du comité d’expertise Ingenium le 16 septembre 2024.
Les communications retenues et discutées en colloque seront publiées sous forme d’actes en ligne. Des articles sélectionnés feront l’objet d’une publication dans un numéro spécial de revue.
Composition du comité scientifique
- Antoine Bouzin, EPSI
- Nathan Coutable, OFC
- Lucie Cuvelier, Réseau Ingenium
- Christelle Didier, EPSI
- Fatma Fourati-Jamoussi, secrétaire Réseau Ingenium
- Sarah Ghaffari, EPSI
- Béatrice Jalenques-Vigouroux, Présidente Réseau Ingenium
- Mélanie Le Forestier, OFC
- Denis Maricourt, Réseau Ingenium
- Stéphanie Merle, EPSI
- David Oget, Réseau Ingenium
OpenEdition vous propose de citer ce billet de la manière suivante :
Christelle Didier (8 avril 2024). Le colloque du réseau Ingenium, avec Epsi et l’OFC du 12 décembre 2024, Paris. Études Pluridisciplinaires Sur l’Ingénierie. Consulté le 8 décembre 2024 à l’adresse https://doi.org/10.58079/w6nn
